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Avocat Nantes La Roche sur Yon Paris

Exception de panorama : l’art, le droit et la politique ne font pas toujours bon ménage

Avocat droit d'auteur NantesDans une décision du 5 juillet 2023, la Cour d’appel de Paris s’est prononcée sur la reprise, notamment par le parti politique La France Insoumise, d’une œuvre de street-art dans plusieurs vidéos utilisées pour les besoins de campagnes politiques.

En substance, la juridiction du fond devait se positionner quant à une atteinte invoquée aux droits d’auteur du street-artiste Combo. Le moins qu’on puisse dire : l’art, le droit et la politique ne font pas toujours bon ménage.

Contexte : l’utilisation par La France Insoumise de la fresque « la Marianne asiatique » dans des vidéos à caractère politique sans l’autorisation de son auteur

Le street-artiste Combo, auteur de la fresque la « Marianne Asiatique », composée de collages et de messages humanistes, a découvert successivement, lors de la campagne présidentielle 2017 puis de l’élection municipale de 2020, l’utilisation de son œuvre sur divers supports, notamment vidéo, pour promouvoir le programme politique de La France Insoumise.

En l’absence de son autorisation et de la mention de son nom, il a assigné son leader, un certain Monsieur M, et La France Insoumise.

Le Tribunal judicaire de Paris, le 21 janvier 2021, a rejeté la demande aux motifs que l’utilisation de la fresque considérée pouvait relever d’exceptions au droit d’auteur.

Pour contester ce jugement, l’auteur a interjeté appel afin de faire valoir les atteintes à ses droits patrimoniaux et à son droit moral.

Solution : La contrariété au droit d’auteur par la reprise d’une œuvre street-art pour un usage promotionnel à des fins politiques

Le rejet de l’exception de liberté de panorama et de l’exception de courte citation

La Cour d’appel a infirmé méthodiquement le jugement de première instance, reconnaissant en filigrane que les œuvres de street-art méritent la pleine et entière protection du droit d’auteur, auquel il n’est possible de déroger.

Elle a ainsi rappelé, sur le fondement notamment des articles L.122-1, L.122-3 et L.122-4 du Code de la Propriété Intellectuelle (CPI), qu’un auteur doit donner son consentement à toute personne souhaitant exploiter son œuvre, nomment pour la produire et la communiquer au public.

Sous réserve, bien entendu que l’usage de l’œuvre ne soit couvert par les exceptions aux droits d’un auteur prévues à l’article L.122-5 du CPI qui, comme le rappelle la Cour d’appel, sont cependant d’interprétation stricte.

Procédant à une analyse du texte et le confrontant à la situation concrète, les juges du fond ont en premier lieu rejeté l’exception dite de panorama (introduite par la loi du 7 octobre 2016) qui prévoit que sont permises, sans autorisation préalable, les « reproductions et représentations d’œuvres architecturales et de sculptures, placées en permanence sur la voie publique, réalisées par des personnes physiques, à l’exclusion de tout usage à caractère commercial ».

Ils ont commencé à cet égard par souligner que « la Marianne Asiatique » ne peut être apparentée aux œuvres architecturales et sculpturales.

Ils ont poursuivi en se penchant sur la seconde condition posant que les œuvres réappropriées doivent être « placées en permanence sur la voie publique ». A cet égard, la Cour insiste sur le fait que les œuvre de street-art subissent les aléas extérieurs (effacement, dégradations) qui empêchent donc de caractériser cette permanence dans l’espace public.

La Cour d’appel de Paris a, dans un second temps, exclu toute application de l’exception de courte citation. En substance, en principe, l’appréciation de l’application de cette exception tient en partie à une mise en perspective entre la taille de l’œuvre citée et celle de l’œuvre qui cite et à la justification d’« un caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou encore d’information ».

Outre le manquement au droit moral (droit à la paternité) justifiant d’emblée la non-application de l’exception, la juridiction a retenu que la fresque était incluse dans les vidéos promotionnelles en omettant les messages l’accompagnant du type « Nous voulons la justice », de sorte qu’il s’agissant d’un « emprunt, sans nécessité évidente, à des fins d’illustration du discours politique ».

En conclusion, pas de bénéfice des exceptions en l’espèce.

 

Le manquement au droit moral sur le double fondement du droit à la paternité et du droit au respect de l’œuvre

En ce qui concerne le droit moral, La France Insoumise n’a à aucun moment précisé le nom « Combo » dans ses diverses publications reprenant uniquement le titre la « Marianne Asiatique ». Pour justifier cette situation, les intimés indiquaient que, sous la fresque, le nom du vrai auteur avait été effacé et remplacé par le pseudonyme « STYX ».

S’appuyant sur l’article L.121-1 du CPI, la cour d’appel estime que le parti politique et son organe promotionnel auraient dû rechercher l’auteur d’origine dans la mesure où une simple recherche suffisait pour identifier le street-artiste Combo mondialement connu et reconnu.

L’atteinte à l’intégrité de l’œuvre a été retenue du fait de l’ajout non autorisé du signe LFI, constituant une appropriation illégitime par les intimés, ce d’autant que cela laissait entendre un soutien de l’auteur au parti concerné.

En résumé, l’intégration d’une œuvre de street-art, même si elle est apposée sur une structure dans le domaine publique, ne peut pas être utilisée librement dans une vidéo par exemple, cette utilisation ne pouvant bénéficier d’aucune exception prévue par la loi à la nécessité d’obtenir l’accord préalable de l’auteur.

Si vous souhaitez bénéficier d’informations relative à la protection par le droit d’auteur, un avocat en droit d’auteur du cabinet SOLVOXIA se tient à votre disposition.

 

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