Parasitisme : il n’est pas nécessaire de démontrer un risque de confusion

Avocat concurrence déloyaleLes actes de parasitisme d’un concurrent peu scrupuleux sont sanctionnés sur le fondement de l’article 1382 du Code civil. Dans un arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris du 15 avril 2016, les juges sont venus préciser sur ce point que nul n’est besoin de démontrer l’existence d’un risque de confusion entre deux sites internet pour invoquer le parasitisme, lorsqu’aucun droit privatif n’est invoqué sur le site internet repris.

 

La société DEBONIX FRANCE exploite son activité de vente d’outillages électroportatifs à partir d’un site internet. Constatant que la société QUINCAILLERIE ANGLES, intervenant dans le même domaine, avait repris l’essentiel de la présentation de son propre site, la société DEBONIX FRANCE l’a assignée au titre du parasitisme.

Alors qu’en première instance le Tribunal de commerce de Paris avait débouté DEBONIX FRANCE de sa demande au motif que cette dernière n’avait pas démontré un risque de confusion, DEBONIX FRANCE a interjeté appel du jugement rendu en reprochant au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit en exigeant la démonstration d’un risque de confusion et en réitérant que « la société QUINCAILLERIE ANGLES a commis une faute en s’appropriant indûment les investissements réalisés pour créer et développer son site internet ».

En appel, les juges ont finalement donné raison à la société DEBONIX FRANCE et ont indiqué que « le grief de parasitisme peut être retenu dans la compétition que se livrent, comme en l’espèce, des acteurs économiques concurrents, lorsqu’est exploitée, au détriment du rival, une création qui ne fait pas l’objet d’un droit privatif sans qu’il soit nécessaire de démontrer l’existence d’un risque de confusion entre les produits ou leur origine ». La Cour d’appel a donc condamné la société QUINCAILLERIE ANGLES à verser des dommages-intérêts à la société DEBONIX FRANCE.

Un aphorisme est protégeable par le droit d’auteur

Avocat droit d'auteur NantesIl résulte de l’article L.112-1 du Code de la propriété intellectuelle que toutes les œuvres de l’esprit peuvent être protégées par le droit d’auteur, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination, pourvu qu’elles soient originales. Dans un arrêt rendu par le Tribunal de grande instance de Paris le 13 mai 2016, la protection par le droit d’auteur a été accordée à des aphorismes.

 

Pour rappel, un aphorisme est une sentence exprimée de manière concise qui résume une situation ou une vérité. Monsieur Alain DAUTRIAT a écrit un recueil d’aphorismes intitulé « Pensées de sel », contenant notamment les aphorismes suivants :

  • « Corbillard – Automobile à l’arrêt, moteur tournant, c’est-à-dire au point mort »
  • « Eve – Le pouvoir magique de ce prénom évocateur tient moins à son histoire qu’au fait qu’on ne lui connaissait pas de belle-famille ».

Estimant que dans son livre « 500 questions que personne ne se pose », Monsieur Laurent BAFFIE posait des questions (« Un corbillard doit-il rester au point mort ? » et « est-ce qu’Adam a apprécié à sa juste valeur le fait de ne pas avoir de belle-mère ? ») reproduisant ses deux aphorismes, Monsieur DAUTRIAT a assigné ce dernier en contrefaçon de ses droits d’auteur.

Pour se prononcer sur la contrefaçon, les juges ont dû se pencher sur la question de l’originalité des deux aphorismes.

Alors que Monsieur BAFFIE faisait valoir que les deux aphorismes étaient des phrases brèves ne faisant « qu’énoncer des vérités banales et nécessaires s’agissant des sujets évoqués » et que Monsieur DAUTRIAT ne pouvait dès lors « s’approprier les thématiques abordées qui sont de libre parcours », les juges ont relevé tout au contraire qu’ils étaient caractérisés par les choix arbitraires de l’auteur et traduisaient un véritable effort de création. Notamment, concernant l’aphorisme sur le « Corbillard », ils ont estimé que l’auteur évoquait « de façon décalée empreinte d’une certaine dérision le thème de la mort en utilisant le registre lexical de l’automobile « moteur, automobile, point mort » ». Quant à l’aphorisme sur « Eve », les juges ont pu relever qu’il « opère un balancement en se référant tout d’abord à la dimension spirituelle de la première femme de l’humanité avant d’utiliser un vocable profane, celui de la belle-famille, pour évoquer de manière singulière et plaisante l’absence d’ascendance du premier couple sur terre ».

Si les juges n’ont pas retenu la contrefaçon, faute de reprise par Monsieur BAFFIE des éléments caractéristiques des aphorismes, ils ont donc toutefois affirmé que ceux-ci étaient protégeables au titre du droit d’auteur.

Je crée mon entreprise. Quelles sont les problématiques PI ?

Avocat droit des marques NantesVous créez votre entreprise. Celle-ci et ses produits ou services auront des noms. Pensez à les protéger à titre de marques en ayant au préalable procédé à une recherche d’antériorités afin de vérifier leur disponibilité.

 

Vos produits sont novateurs esthétiquement et techniquement. Pensez à protéger les aspects techniques par brevet, et leur apparence par dessins et modèles.

Vous serez présent sur Internet. N’oubliez pas de réserver le nom de domaine correspondant.

Votre activité est tournée autour du monde logiciel, un dépôt de vos codes apparaît nécessaire.

L’ensemble de ces innovations a été réalisé par des tiers-prestataires. A défaut de cession, ces derniers demeurent en principe propriétaires des droits dessus. Anticipez donc en amont une cession en bonne et due forme respectant le formalisme applicable pour chacun de ces droits.

Rubik’s cube : le casse-tête des marques tridimensionnelles

Avocat droit des marques NantesAlors qu’un signe doit être considéré comme distinctif pour pouvoir être enregistré en tant que marque, l’article L.711-2 du Code de la propriété intellectuelle dispose qu’un signe est dépourvu de caractère distinctif lorsqu’il est notamment constitué par la forme imposée par la nature ou la fonction du produit.

 

La marque tridimensionnelle Rubik’s cube s’avère être un vrai casse-tête sur le sujet, comme en témoigne l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 23 mars 2016.

La société SEVEN TOWNS LTD a déposé le 9 juin 2008 la marque tridimensionnelle Rubik’s cube, représentée comme suit :

Suite à une saisie douanière de ses marchandises, la société ROCKET DIFFUSION a été assignée en contrefaçon, au moyen que cette dernière contrefaisait la marque tridimensionnelle Rubik’s cube. En défense, cette société a fait valoir que la marque tridimensionnelle Rubik’s cube invoquée devait être annulée, faute de distinctivité.

En première instance ainsi qu’en appel, les juges ont considéré que « les caractéristiques du signe tridimensionnel, constitué de vingt-sept petits cubes formant un cube à six faces de couleurs différentes et composées de neufs petits cubes chacune, sont attribuables uniquement au résultat technique ou utilitaire d’un casse-tête » et qu’elles sont « imposées par la nature ou la fonction d’un puzzle en trois dimension ». Ils ont donc conclu au caractère non protégeable de ce signe et, en conséquence, ont constaté l’absence de contrefaçon.

Après un pourvoi de l’administration des douanes, la Cour de cassation a cassé l’arrêt de la Cour d’appel. En effet, les juges ont considéré que la Cour d’appel n’avait pas justifié sa décision en ne précisant pas suffisamment « en quoi les caractéristiques du signe tridimensionnel sont imposées par la nature ou la fonction d’un puzzle en trois dimensions ».

Chorégraphies : protection par le droit d’auteur de la combinaison de gestes simples

Avocat droit d'auteurPour bénéficier de la protection par le droit d’auteur, l’auteur doit faire porter à son œuvre l’empreinte de sa personnalité rendant ainsi sa création singulière par les choix opérés. De fait, l’article L.112-1 du Code de la propriété intellectuelle accorde la protection à « toutes les œuvres de l’esprit ».

 

Dans une décision rendue par le Tribunal de grande instance de Paris le 13 mai 2016, les juges ont reconnu une protection par le droit d’auteur sur neuf chorégraphies, bien qu’étant composées de mouvements simples et communs.

Madame Khemtemourian est chorégraphe, spécialisée en danse contemporaine et sacrée. La société KAIRU dispense des formations et des ateliers pour les entreprises favorisant l’épanouissement, dont l’atelier « Ennéagramme et Créativité ». Madame Khemtemourian a créé neuf chorégraphies à la demande de la gérante de la société KAIRU. Cette dernière a commercialisé un coffret intitulé « les 9 portes de l’âme » contenant un DVD reproduisant les neuf chorégraphies composées par Madame Khemtemourian. Aucun contrat de cession des droits n’a été signé, ni aucune rémunération perçue par cette dernière.

Madame Khemtemourian a fait assigner la société KAIRU en reconnaissance de sa qualité d’auteur des chorégraphies, afin de faire constater l’exploitation illicite de celles-ci et d’obtenir de ce fait des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

Alors que la société KAIRU soutenait que les chorégraphies n’étaient pas originales, les mouvements utilisés étant, selon elle, trop simples et inhérents aux danses sacrées (« mouvements de marche en cercle, paumes ouvertes, des mains jointes en signe de prière, des bras tendus vers le haut puis vers le bas, des pas chassés »), les juges du Tribunal de grande instance de Paris ont indiqué que « chaque chorégraphie résulte de choix d’une combinaison de ces gestes et d’un rythme propre en harmonie avec la musique sélectionnée pour les accompagner, qui est également à l’origine de l’inspiration de la chorégraphe ». Dès lors, il s’agit bien d’œuvres originales bénéficiant de ce chef de la protection au titre du droit d’auteur.

La reproduction des chorégraphies étant donc contrefaisante, Madame Khemtemourian a obtenu versement de dommages et intérêts.