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Avocat Nantes La Roche sur Yon Paris

Droit d’auteur : difficile de protéger une photo selfie

Avocat droit des marques NantesUne décision du 12 mai 2023 de la Cour d’appel de Paris illustre les difficultés pour protéger une photo, au cas d’espèce un style récurrent de photos, prise en selfie et destinée aux réseaux sociaux.

 

Contexte : une volonté de protéger une photo contre sa reprise alléguée par une campagne publicitaire

 

Une influenceuse avait développé un rituel de se prendre régulièrement en selfie dans sa cage d’ascenseur, accompagnée de son chien, afin de présenter les tenues qu’elle choisissait de porter à ses abonnés sur différents réseaux sociaux et sur son blog Internet.

Elle reprochait à une société, pour une campagne publicitaire relative à leur nouvelle collection de vêtements, d’utiliser des photographies imitant son style, à savoir un modèle pris en photographie dans un ascenseur avec un chien, et donc de faire un acte de reproduction de son image.

L’influenceuse a donc agit en contrefaçon de droits d’auteur, dont elle invoquait la protection sur les images qu’elle avait réalisées, ainsi qu’en concurrence déloyale et parasitaire devant le Tribunal judiciaire de Paris. Ce dernier a toutefois rejeté ses demandes en 2021 et l’influenceuse a formé appel.

 

Solution : ni la contrefaçon, ni la concurrence déloyale ou le parasitisme ne protègent un style de photographie

 

La contrefaçon ne permet au présent cas pas de protéger une photo…

 

Pour justifier de l’originalité de ses photographies, l’influenceuse invoquait différents choix de sa part tenant par exemple :

  • Au décor, à savoir une cage d’ascenseur au revêtement argenté éclairé par une lumière artificielle,
  • Au sujet, à savoir elle-même prise en mode selfie,
  • A une posture particulière, la laisse de son chien dans une main, son téléphone portable dans l’autre et le regard vers le bas,
  • Au cadrage, en optant pour un format vertical permettant la mise en valeur de sa tenue,
  • A l’absence de retouche de son image avant sa mise en ligne sur Internet.

Pour la Cour d’appel, comme pour le Tribunal judiciaire avant elle, la demanderesse n’explique pas les raisons ayant motivé ces choix, alors que le selfie en question se borne finalement à reproduire l’éclairage artificiel de l’ascenseur sans utiliser d’autre ajustement technique.

Elle relève de plus que des photographies issues de choix similaires ont déjà été réalisées auparavant par d’autres influenceurs, et que la demanderesse ne faisait finalement que s’inscrire dans ce mouvement.

Les arguments tenant au fait que l’influenceuse ait fait de ces photographies un rituel quotidien ou que certains abonnés aient cru la reconnaître dans la photographie de la société de prêt-à-porter ne démontrent pas plus une quelconque originalité selon la Cour, la demanderesse ne pouvant pas s’approprier un « style » de photographie.

Faute d’originalité et donc de protection par le droit d’auteur, la contrefaçon est écartée.

 

Bien que l’influenceuse ne soit pas une concurrente de l’entreprise de prêt-à-porter, la Cour rappelle qu’il ne s’agit pas d’une condition pour pouvoir agir en concurrence déloyale ou en parasitisme (pour un autre exemple de ce principe, voir la décision rendue dans l’affaire But).

Elle rejette néanmoins les demandes sur ces deux fondements :

  • S’agissant de la concurrence déloyale, elle relève que – tout comme l’influenceuse – l’enseigne de prêt-à-porter s’est inscrite dans une tendance sur laquelle la demanderesse ne pouvait prétendre avoir de droits, précisant au surplus que l’influenceuse bénéficiait d’une notoriété relativement faible (environ 300 personnes par publication) ;
  • S’agissant du parasitisme, l’influenceuse ne démontrait ni avoir effectué des investissements pour mettre au point son « style » photographique, ni bénéficier d’une notoriété derrière laquelle la défenderesse aurait cherché à se placer. Elle ne pouvait donc pas plus utiliser cette notion pour chercher à obtenir des droits.

 

En résumé, protéger une photo ou un style de photos destiné aux réseaux sociaux (et donc par principe accessible aisément) n’est pas chose facile, car encore faut-il démontrer l’originalité de chaque image réalisée (protection par le droit d’auteur) ou justifier avoir fait naître une véritable valeur économique via l’image gagnée en ligne (protection par la concurrence déloyale ou le parasitisme).

Vous souhaitez en savoir plus sur ce sujet, un avocat propriété intellectuelle du cabinet SOLVOXIA se tient à votre disposition.

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