Modèles communautaires : le délai de grâce n’exige pas une copie conforme !

Avocat droit dessins et modèlesDans une décision du 12 mars 2025 (affaire T-66/24), le Tribunal de l’Union européenne (TUE) a eu l’occasion de se prononcer sur une demande en nullité de modèle fondée sur l’absence de nouveauté et de caractère propre et pour lequel le délai de grâce de douze mois avait été invoqué.

 

Contexte : une action en nullité de modèle fondée sur l’absence de nouveauté et caractère propre du fait de l’auto-divulgation du déposant

 

Une société avait formé une demande de nullité d’un modèle communautaire déposé en 2017 portant sur une ampoule d’éclairage à diodes électroluminescentes motif tiré de l’absence de nouveauté et de caractère propre en raison d’une divulgation antérieure par son déposant.

Ce dernier avait en effet divulgué son modèle mais avait par la suite procédé à son dépôt dans les douze mois de la divulgation ce qui lui permettait, en principe, d’invoquer le délai de grâce empêchant ainsi la requérante de lui opposer cette divulgation pour justifier une absence de nouveauté du modèle.

En réponse, la société requérante arguait que le modèle divulgué et le modèle in fine déposé n’étaient pas identiques or selon elle, le délai de grâce ne s’applique qu’entre deux modèles qui sont strictement identiques.

Après s’être vue rejeter sa demande en nullité par l’EUIPO, la requérante a saisi le Tribunal de l’Union européenne de l’affaire.

 

Solution : le délai de grâce n’implique pas une identité entre le modèle divulgué et celui in fine déposé

 

La nécessité néanmoins de deux dessins ou modèles produisant une même impression globale

 

Pour rappel, un dessin ou modèle ne peut être enregistré s’il ne répond pas aux deux conditions de caractère individuel et de nouveauté. Cette dernière condition s’entend de façon large car il est tenu compte des dessins et modèles déjà enregistrés auprès des offices mais également de l’ensemble des dessins et modèles divulgués au public sans être pour autant enregistrés. Une exception toutefois : le déposant ne peut se voir opposer sa propre divulgation si le dépôt a lieu dans les douze mois.

La requérante soutenait que cette exception n’était pas applicable en l’espèce pour la raison ci-dessus évoquée mais le Tribunal de l’Union européenne a jugé à l’inverse que l’exception de délai de grâce fondée sur l’article 7 paragraphe 2 du règlement n°6/2002 « ne saurait être interprété comme signifiant que le dessin ou modèle divulgué au public devrait être « identique » au dessin ou modèle contesté ou devrait être le « même » dessin ou modèle que celui contesté ».

En effet, le Tribunal de l’UE relève que le libellé de cet article n’emploie pas le terme « identique » ou « même modèle » Ainsi, il doit être tenu compte d’un lien étroit entre le dessin ou modèle divulgué et celui enregistré, ce lien pouvant être trouvé dans une identité entre les deux ou alors lorsque les deux produisent la même impression globale.

 

Une justification liée à la fonction même du délai de grâce

 

En réponse à l’argument de la requérante, le Tribunal de l’UE justifie son interprétation de l’exception du délai de grâce par son objectif.

Il relève en effet que conformément au considérant 20 du règlement n°6/2002, il est nécessaire de permettre aux créateurs de tester leur produit intégrant le dessin ou modèle sur le marché avant de décider si oui ou non la protection offerte par l’enregistrement est souhaitable. Ainsi, imposer une identité entre le dessin et modèle divulgué et celui enregistré mettrait à mal cet objectif.

 

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L’opposition contre la marque WELCOME jugée BIENVENUE

Avocat droit des marques NantesDans une décision du 20 décembre 2024, la Cour d’appel de Paris s’est prononcée sur la question de savoir s’il existait un risque de confusion entre le signe WELCOME et le signe antérieur BIENVENUE.

 

Contexte : opposition entre les signes WELCOME et BIENVENUE

 

Dans cette affaire, le titulaire de la marque antérieure BIENVENUE, déposée pour des produits cosmétiques et lavants, a formé opposition contre la demande d’enregistrement de la marque WELCOME, déposée en partie pour les mêmes produits. Le directeur général de l’INPI a, par décision du 19 juillet 2023, fait partiellement droit à ses demandes et a rejeté en conséquence la demande d’enregistrement pour lesdits produits.

Insatisfait de la décision de l’INPI, le déposant a interjeté appel de cette dernière.

 

Solution : la ressemblance conceptuelle des signes en cause l’emporte sur les différences phonétiques et visuelles

 

Le débat sur les preuves d’usage sérieux et la similitude des produits

 

Après des développements conséquents sur la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure pour les produits en cause, la Cour a commencé par rappeler qu’il n’est pas nécessaire, pour que l’usage sérieux soit caractérisé, que celui-ci soit quantitativement important tant qu’est démontrée une exploitation commerciale effective du signe pour les produits visés. Elle a ensuite retenu en l’espèce que les factures versées aux débats (notamment) témoignaient d’une constance dans l’exploitation de la marque dans des volumes suffisants.

Pour opérer ensuite son appréciation du risque de confusion entre les marques, la Cour s’est penchée sur la comparaison des produits litigieux. Le déposant contestait la similitude entre les « crèmes cosmétiques ; nécessaires de cosmétiques ; maquillage » de sa demande d’enregistrement et les « cosmétiques, shampooings, lotions pour cheveux et corps, crèmes de beauté, savons, à savoir savons pour le corps » de la marque antérieure.

Or, la Cour a retenu l’identité, ou à tout le moins la similitude, de ces produits, considérant qu’ils sont de même nature (industrie de la cosmétologie), de mêmes fonctions et de mêmes destinations (même public cible à savoir les personnes désireuses de prendre soin d’elles, mêmes circuits de distribution).

 

La similitude des signes sur le plan conceptuel  

 

La Cour a ensuite examiné la similitude des signes en cause. Le déposant soutenait que les termes WELCOME / BIENVENUE présentaient des différences visuelles et phonétiques telles qu’elles excluaient tout risque de confusion entre eux, le public français étant d’un niveau d’anglais assez faible et ne pouvant faire de rapprochement entre ces deux mots.

La Cour, bien qu’elle admette dans un premier temps qu’il existe des différences visuelles et phonétiques entre les signes, a toutefois considéré dans un second temps que, sur le plan conceptuel, ceux-ci avaient la même signification puisque WELCOME est la traduction littérale de BIENVENUE en anglais, ce que ne peut ignorer le grand public qui a les notions élémentaires d’anglais. Elle a ainsi estimé qu’il serait à même de lui redonner « immédiatement et sans efforts de recherche ou d’interprétation sa signification de ‘bienvenue’ ».

En conséquence, les juges ont débouté l’appelant et conclu à l’existence d’un risque de confusion entre les marques, les consommateurs pouvant être amenés à établir un lien entre les deux sociétés titulaires.

 

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Données personnelles : accès et excès

Avocat rgpdDans une décision du 9 janvier 2025 (C-416/23), la Cour de Justice de l’Union Européenne a été amenée à répondre à des questions préjudicielles sur le caractère excessif de réclamations formées auprès d’autorités de contrôles de données personnelles.

 

Contexte : de nombreuses réclamations soulevées auprès de l’autorité de contrôle autrichienne

 

Une personne autrichienne, manifestement procédurière en matière de données personnelles, contactait régulièrement des responsables de traitements pour solliciter un accès à ses données personnelles traitées, comme cela lui est permis par le RGPD.

Lors de refus ou d’absence de réponse de la part du responsable concerné, elle soumettait une réclamation à l’autorité de contrôle autrichienne (la DSB).

Cette dernière avait fini par refuser de donner suite à une réclamation, estimant qu’elle avait un caractère excessif : l’autorité indiquait notamment que la personne en question lui avait adressé près de 80 réclamations similaires à l’encontre de divers responsables de traitements dans un intervalle de 20 mois.

L’article 57 du RGPD laisse en effet la possibilité aux autorités de contrôle de refuser de donner suite à une réclamation (selon le même régime que pour les responsables de traitement) lorsque les demandes « sont manifestement infondées excessive, en raison, notamment, de leur caractère répétitif ».

Le tribunal fédéral administratif autrichien a annulé la décision de la DSB, considérant en substance que le caractère excessif d’une demande, supposait une répétition fréquente des demandes mais aussi un caractère manifestement vexatoire ou abusif de celles-ci.

Saisi par la DSB d’un recours en révision, la Cour administrative autrichienne a posé à la Cour de Justice de l’Union Européenne trois questions préjudicielles.

 

Solution : un nombre élevé de réclamations, critère insuffisant pour ne pas y donner suite

 

1/ L’insuffisance du caractère répété des demandes

 

La Cour de Justice, répondant à la première question, rappelle tout d’abord que les réclamations formées auprès d’une autorité de contrôle, font partie de la catégorie plus large des « demandes » visées par l’article 57 du RGPD.

S’agissant ensuite surtout de l’appréciation du caractère excessif de ces réclamations, la Cour de Justice rappelle d’abord que les personnes bénéficient d’un droit d’accès à leurs données, et que fixer un seuil chiffré absolu au-delà duquel des réclamations deviendraient automatiquement qualifiées d’excessives, pourrait porter atteinte à ce droit d’accès.

Dès lors, le nombre de réclamations introduites n’est pas, à lui seul, un critère suffisant pour caractériser un abus.

Pour caractériser une demande excessive ou infondée, il appartient donc à l’autorité de contrôle de démontrer que le nombre important de demandes formées s’explique non par la volonté de la personne concernée d’obtenir une protection de ses droits mais par une finalité autre, telle que par exemple entraver le bon fonctionnement de l’autorité de contrôle.

 

2/ Le libre choix de la réponse à apporter à une demande infondée ou excessive

 

Lorsqu’une demande est excessive ou infondée, le texte laisse la possibilité à l’autorité de contrôle d’exiger de la personne concernée le paiement de frais raisonnables basés sur les coûts administratifs ou de refuser de donner suite à la demande.

La Cour administrative autrichienne s’interrogeait sur le fait de savoir si ce choix était totalement libre pour l’autorité de contrôle.

La Cour de Justice rappelle que le texte ne comporte aucune hiérarchie entre les options laissées à l’autorité de contrôle.

Par conséquent, compte tenu de l’importance de la possibilité pour les personnes d’introduire des réclamations, il appartient aux autorités de prendre en compte toutes les circonstances pertinentes et de s’assurer du caractère approprié, nécessaire et proportionné de l’option choisie, sans qu’il ne puisse être imposé à l’autorité de privilégier dans un premier temps le paiement de frais par la personne demanderesse.

En résumé, le fait qu’une personne adresse un nombre important de réclamations à une autorité de contrôle n’est pas suffisant pour que ladite autorité refuse de donner suite à ses demandes.

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L’architecte peut-il s’opposer à la destruction ou la rénovation d’un bien immobilier ?

Avocat droit d'auteur NantesVous êtes un acteur du secteur immobilier ou un particulier, vous avez récemment acquis un bien et vous demandez si vous allez opter pour une rénovation ou pour une destruction totale ou partielle en vue d’une reconstruction à neuf ? Dans le cadre de cette réflexion, une question à se poser est celle de savoir si l’architecte de ce bâtiment peut s’opposer à ces opérations.

 

Un bien immobilier peut-il bénéficier de la protection conférée par le droit d’auteur ?

 

Lorsque l’on évoque le droit d’auteur on pense généralement à des peintures, sculptures, photographies, romans ou encore à des compositions musicales. En réalité, le droit d’auteur a un spectre beaucoup plus large, le Code de la propriété intellectuelle donnant à cet égard quelques exemples qui en témoignent (article L. 112-2) dont notamment les conférences, allocutions, cartes géographiques ou encore les logiciels.

Dans cette liste, sont par ailleurs précisément évoquées les œuvres d’architecture mais encore les plans ou croquis qui y sont relatifs.

Donc oui, un bien immobilier peut par hypothèse bénéficier de la protection conférée par le droit d’auteur, à une condition cependant : être original.

 

Protection conférée à condition d’originalité

 

Toute création, quelle que soit sa nature, doit répondre à la condition d’originalité pour bénéficier d’une protection par le droit d’auteur. Elle est habituellement reconnue quand il est démontré par l’auteur que sa création porte « l’empreinte de sa personnalité ». Il s’agira de sa « patte » rédactionnelle pour un ouvrage ou de son style dans le cadre d’œuvres plus graphiques.

Qu’est-ce que cela recouvre concrètement ? Il faut que l’auteur soit en capacité d’expliquer quels choix créatifs il a fait, quels étaient ses partis-pris esthétiques, sans que ceux-ci :

  • ne résultent quasi-exclusivement de contraintes du type PLU, topographie du terrain, contraintes dictées par les clients, etc. (exemple en ce sens pour un immeuble : Cour d’appel de Paris, 6 septembre 2023, n°21/03/848).
  • n’apparaissent comme banals au vu du domaine concerné et/ou tombés dans le domaine public (exemple en ce sens pour des verrières : Cour d’appel de Paris, 9 octobre 2024, n°22/20264). Il a déjà pu être considéré par exemple qu’une maison d’habitation était tout à fait originale au vu des développements de l’architecte, d’autant qu’elle avait été mise en avant dans une revue d’architecture.

La même condition s’appliquera également aux plans et croquis relatifs au bien, si l’architecte invoque des droits d’auteur sur ces derniers (exemple en ce sens pour des plans d’architecture paysagère : Cour d’appel de Versailles, 16 mai 2013, n°10/09724).

 

Des formalités sont-elles à réaliser par l’architecte pour invoquer des droits d’auteur ?

 

Contrairement au droit des marques ou des brevets par exemple, aucune formalité n’est requise pour que l’auteur d’une création bénéficie des droits sur cette dernière, tant qu’il démontre son originalité.

Cela signifie donc qu’il est investi des éventuels droits d’auteur sur ses plans, croquis ou encore sur son bâti, dès le jour de leur création.

L’idéal est donc que les parties puissent dialoguer, beaucoup de contentieux naissant d’une absence de communication.

 

Quels droits pour l’architecte sur son bien ?

 

L’architecte dispose sur ses plans, croquis ou sur son bien, s’ils sont originaux, de droits d’auteur qui se subdivisent en deux composantes distinctes :

  • des droits économiques/patrimoniaux : ces droits lui permettent de disposer d’un monopole sur l’exploitation de sa création, c’est-à-dire d’être le seul à pouvoir autoriser (le cas échéant moyennant contrepartie financière) ou interdire toute reproduction de cette dernière, quel que soit le support utilisé (ex : copier une maison pour en faire une seconde, utiliser l’image d’un bien original pour vendre des cartes postales ou en faire des produits dérivés).

Ces droits durent, sauf tempéraments, de la création du bien et pendant un délai de 70 ans après le décès de l’architecte.

  • des droits moraux : ces droits lui permettent d’exiger que son nom soit associé à toute reproduction de sa création mais également de s’opposer à toute modification, altération ou destruction par exemple de son bien immobilier en invoquant le droit au respect de sa création (article L. 121-1 du Code de la propriété intellectuelle).

Les droits moraux sont imprescriptibles.

Ces droits, et précisément ici le droit moral, semblent donner à l’architecte un pouvoir important sur le devenir de son bien immobilier et ses éventuels propriétaires successifs.

Ceci étant, en matière juridique, tout est souvent question de balance entre les intérêts et droits des parties en présence.

Or, le propriétaire d’un bien immobilier a un droit de propriété sur ce dernier, lui donnant le pouvoir d’en disposer de la manière la plus large, en ce compris le droit de le détruire, de le rénover, de l’agrandir (sous réserve également du respect des règles d’urbanisme et d’éventuelles servitudes).

Vous l’aurez compris, en réalité tout est question de cas concret et de savoir où mettre le curseur dans la balance entre ces droits fondamentaux afin de permettre une cohabitation dans des situations parfois tendues. La nuance est ici de mise.

 

Comment droit de propriété et droit d’auteur sont conciliés en pratique ?

 

La conciliation de ces deux droits fondamentaux n’est pas chose aisée mais une jurisprudence abondante est venue éclairer d’un point de vue pratique le sujet en vue de tenter de concilier tant les intérêts des architectes que ceux des propriétaires de biens immobiliers.

Ainsi, l’architecte ne peut imposer l’intangibilité du bien qu’il a conçu et le propriétaire ne peut de son côté procéder qu’à des modifications qui n’excèdent pas ce qui est strictement nécessaire au but poursuivi et qui ne paraissent donc pas disproportionnées.

Quelques exemples dans lesquels la balance a été favorable aux propriétaires de biens :

  • Lorsque le grand public a eu suffisamment de temps pour contempler le bien et en profiter,
  • Lorsqu’il est justifié d’un intérêt supérieur comme par exemple un besoin de relogement ou encore des considérations relevant de la sécurité publique,
  • Lorsque l’immeuble n’est pas classé au titre des monuments historiques,
  • Lorsque l’alternative à la démolition proposée n’est pas satisfaisante,
  • Lorsque le bâtiment a une fonction utilitaire et non esthétique.

Il est donc essentiel, avant toute destruction ou modification d’un bien dont vous seriez propriétaire, de vous poser la question d’éventuels droits de propriété intellectuelle qui pourraient porter sur ce dernier, au bénéfice de l’architecte qui l’a conçu.

 

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La renommée de la marque ABBA reconnue par l’EUIPO

Avocat droit des marques NantesDans une décision du 4 février 2025 (B 3 148 086), la division d’opposition de l’EUIPO a eu l’occasion de se prononcer dans le cadre d’une opposition du titulaire de la marque internationale antérieure « ABBA » (la maison de disque du célèbre groupe suédois de musique éponyme) à l’encontre de l’enregistrement de la marque européenne « Viña ABBA » déposée pour des « Boissons alcoolisées à l’exception des bières » en classe 33.

 

Contexte : la marque de l’UE « Viña ABBA » avait été déposée pour de l’alcool en classe 33 et la maison de disque du groupe ABBA s’était opposée à son enregistrement

 

Une société portugaise productrice de vin, avait déposé le 28 janvier 2021 la marque européenne « Viña ABBA » pour désigner des boissons alcoolisées à l’exception des bières en classe 33.

La maison de disque suédoise, ayant notamment enregistré les trois derniers albums studio du groupe ABBA et titulaire de la marque internationale antérieure « ABBA » avait formé opposition à l’encontre de ce dépôt. Faute de pouvoir opposer des droits sur sa marque pour les boissons alcoolisées suite à une décision d’annulation, elle soutenait que sa marque bénéficiait d’une renommée lui permettant néanmoins de s’opposer à l’enregistrement de la marque litigieuse pour les produits en classe 33.

Saisi de cette opposition, l’EUIPO a été amené à se prononcer sur cette opposition fondée sur l’article 8,5) du Règlement UE 2017/1001 sur la marque européenne qui précise : «  sur opposition du titulaire d’une marque antérieure enregistrée […], la marque demandée est refusée à l’enregistrement si elle est identique ou similaire à une marque antérieure, indépendamment du fait que les produits ou services pour lesquels elle est demandée sont identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque cette marque antérieure est une marque de l’Union européenne qui jouit d’une renommée dans l’Union ou une marque nationale qui jouit d’une renommée dans l’État membre concerné, et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de cette marque antérieure ou leur porterait préjudice. »

 

Solution : l’opposition est justifiée et la demande d’enregistrement de la marque européenne est totalement rejetée

 

Selon l’EUIPO, la marque antérieure possède un degré élevé de distinctivité acquise grâce à sa renommée. La marque bénéficie d’une forte renommée, et les signes en cause présentent des similitudes notables, avec au moins un degré moyen de ressemblance visuelle et auditive.

L’élément commun « ABBA », bien que dénué de sens en soi, est, selon l’office, désormais associé par le grand public aux enregistrements du groupe musical éponyme. Les consommateurs qui reconnaissent ce terme dans le signe contesté le feront en raison de la notoriété de la marque antérieure, générant une association immédiate avec cette dernière.

Compte tenu de la forte notoriété du signe antérieur et des similitudes entre les signes, notamment lorsque la marque antérieure est entièrement contenue dans le signe contesté, il est probable que celui-ci évoque la marque renommée, notamment en lien avec les boissons alcoolisées.

Les consommateurs pourraient ainsi établir un « lien » mental entre les signes, influençant leur comportement d’achat en faveur des produits commercialisés sous le signe contesté. La requérante bénéficierait ainsi de l’image positive de la marque antérieure sans supporter les coûts de promotion habituels.

En conclusion, l’utilisation de la marque contestée permettrait à la requérante de tirer indûment profit de la renommée de la marque antérieure, détournant ainsi sa puissance commerciale au détriment de cette dernière, dans l’ensemble de l’Union européenne. Partant de là, l’opposition est jugée justifiée.

 

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