Contrat informatique : l’exclusion de l’indemnisation de dommages indirects jugée valide

avocat contrat informatiqueDans une décision du 17 décembre 2024 (n°24/00046), la Cour d’appel de Toulouse s’est prononcée sur la validité d’une clause limitative de responsabilité dans un contrat informatique.

 

Contexte : des dysfonctionnements logiciels conduisant à un refus de payer

 

Une société ayant une activité de transaction immobilière, de gestion locative et de syndic de copropriété avait souscrit auprès d’un éditeur logiciel un abonnement à des solutions logicielles dédiées à son activité.

Alléguant des difficultés dans l’utilisation de ces logiciels, elle avait cessé de payer ses échéances mensuelles et sollicité la rupture du contrat aux torts de l’éditeur des solutions.

Ce dernier, contestant toute faute, l’avait mise en demeure de lui régler les factures puis l’avait assignée devant le Tribunal de commerce de Toulouse.

Le juge de commerce ayant condamné la société cliente à régler l’intégralité des factures, cette dernière a interjeté appel du jugement rendu.

 

Solution : des dysfonctionnements reconnus mais pas d’indemnisation du préjudice

 

1/ Les manquements du prestataire retenus en appel

 

La société cliente invoquait des dysfonctionnements récurrents des logiciels fournis, qu’elle justifiait via différentes pièces : des copies de mails et de demandes d’assistance adressés au support technique de l’éditeur du logiciel, une attestation de son prestataire informatique justifiant de la récurrence des problèmes mais également une analyse informatique réalisée par un expert soulignant que les nombreuses erreurs relevées par la société étaient essentiellement dues à des problèmes de développement.

Contrairement au Tribunal de commerce, la Cour d’appel a considéré que ces éléments démontraient que la société informatique n’avait pas satisfait à son obligation de délivrance conforme.

La récurrence des dysfonctionnements constatés et l’impossibilité pour le client de poursuivre normalement ses activités professionnelles établissaient la gravité des manquements reprochés à l’intimée et justifiaient donc l’arrêt des paiements des factures, sur le fondement de l’exception d’inexécution (articles 1219 et 1220 du Code civil).

 

2/ L’application de clauses limitatives de responsabilité conduisant à écarter toute indemnisation de la société cliente

 

La société cliente demandait également l’indemnisation du préjudice subi du fait des dysfonctionnements précités.

La Cour d’appel, après avoir rappelé que les parties sont libres d’aménager contractuellement les conséquences – notamment indemnitaires – de l’inexécution, relève que le contrat contenait ici une clause limitant l’indemnisation due par le prestataire aux préjudices directs et prévisibles et ce, pour un montant maximum correspondant à l’ensemble des sommes versées par la cliente dans les 12 derniers mois.

La société cliente soulevait que cette clause devrait être réputée non écrite, au motif qu’elle priverait de toute substance l’obligation essentielle du prestataire.

La Cour d’appel n’a toutefois pas retenu cette analyse, relevant que la clause n’interdisait ni l’engagement de la responsabilité du prestataire, ni l’indemnisation du préjudice subi par la cliente : la clause a donc été jugée valide.

Or, en l’espèce, aucun des préjudices invoqués par la cliente n’étaient des préjudices directs et prévisibles selon la juridiction (impossibilité d’exécuter les missions, perte de clients, perte de chiffre d’affaires, perte de chance de développement d’activité, etc.), et toute indemnisation due par le prestataire a donc été exclue de ce fait.

En résumé, une clause limitative de responsabilité, lorsqu’elle est bien rédigée, constitue une protection efficace du prestataire dans des contrats informatiques.

 

Nos avocats en contrats informatique se tiennent à votre disposition pour vous assister dans la rédaction de telles clauses.

 

Utilisation de données LinkedIn sans le consentement de l’utilisateur : qui publie consent !

Avocat concurrence déloyale Nantes ParisDans un jugement du 30 septembre 2024, le Tribunal de commerce de Paris s’est prononcé sur une action en concurrence déloyale d’une société exploitant une plateforme de recrutement à l’encontre d’une concurrente fondée sur le fait que cette dernière s’était affranchie du respect des dispositions du RGPD, notamment en procédant à l’extraction massive de données publiques LinkedIn sans le consentement préalable des titulaires des comptes, et des CGU du réseau.

 

Contexte : une action en concurrence déloyale fondée sur le non-respect du RGPD et des CGU de LinkedIn

 

Une société exploitant une plateforme de recrutement en ligne de talents dans les nouvelles technologies avait constaté que l’une de ses concurrentes s’était développée en adoptant des pratiques, selon elle, déloyales dans un contexte de marché du recrutement très tendu en raison du manque de candidats.

La demanderesse soutenait que sa concurrente s’était rendue coupable de concurrence déloyale à son encontre en ne respectant pas les dispositions du « Règlement général sur la protection des données » (RGPD) par des extractions, selon elle, « massives » de données publiques sur le réseau social LinkedIn sans demander le consentement des titulaires des profils sur ce réseau et en allant à l’encontre des CGU de LinkedIn.

Elle l’a donc assignée devant le Tribunal de commerce de Paris afin de voir condamner ses agissements illicites, sollicitant plus d’un million d’euros en réparation de ses différents préjudices.

 

Solution : l’utilisation de données  LinkedIn sans consentement ne constitue pas un acte de concurrence déloyale mais le non-respect des CGU si

 

La possibilité d’utiliser les données personnelles issues d’un profil public LinkedIn sans consentement préalable de l’utilisateur

 

Pour mémoire, l’article 5 du RGPD dispose que les données personnelles doivent être « traitées de manière licite, loyale et transparente au regard de la personne concernée ».

Selon la demanderesse, sa concurrente aurait pratiqué pour se développer, entre 2016 et 2020, des extractions massives des données personnelles de candidats sur les réseaux sociaux professionnels et notamment LinkedIn, créé des profils de candidats sur sa plateforme sans recueillir le consentement de ces personnes et transféré ces profils à ses clients sans encore une fois recueillir leur consentement.

Le Tribunal a ici souligné que les utilisateurs des réseaux sociaux professionnels tel que LinkedIn s’y inscrivent pour exposer leur curriculum vitae et les expériences professionnelles dont ils sont fiers. Ainsi, les utilisateurs de LinkedIn publient volontairement ces informations afin de booster leur carrière et attirer les employeurs professionnels.

Ainsi, poursuit le Tribunal, chaque utilisateur « s’expose sciemment à ce que les informations qu’il y dépose volontairement soient utilisées dans le cadre de la recherche de profils adaptés pour des employeurs éventuels ».

La juridiction en conclut qu’il n’a ici pas été démontré d’atteinte à l’article 5 du RGPD, la demande en concurrence déloyale sur ce fondement étant donc rejetée.

 

Une récupération automatisée des données contraire aux CGU de LinkedIn néanmoins constitutive de concurrence déloyale

 

Il était également reproché à la société défenderesse de ne pas respecter les conditions générales d’utilisation de LinkedIn en effectuant de manière automatique des prélèvements d’information sur la plateforme pour constituer les profils de candidats proposés à ses clients.

Les CGU prévoyaient en effet que les utilisateurs du réseau s’engagent à « ne pas développer …. ou utiliser des logiciels …. visant à effectuer du web scraping des Services ou à copier par ailleurs des profils et d’autres données des Services ».

Or, en l’espèce, la société attaquée s’était adonnée à de telles pratiques pendant au moins 5 mois – ce dont elle ne se cachait pas puisque ressortait de déclarations publiques – ce qui était, selon les juges, constitutif d’actes de concurrence déloyale à l’encontre de la demanderesse.

La demanderesse a obtenu paiement de 10.000 euros de dommages et intérêts, étant précisé qu’elle a elle-même été condamnée au même montant en raison du dénigrement dont elle se serait rendue coupable à l’égard de sa concurrente. Un partout balle au centre…

 

En résumé donc, il faut toujours être vigilant au respect des règles qui s’appliquent à votre activité pour éviter d’être considéré comme adoptant un comportement déloyal à l’égard de vos concurrents qui les respectent.

 

Vous souhaitez en savoir plus sur le sujet, un avocat en concurrence déloyale du cabinet SOLVOXIA AVOCATS se tient à votre disposition.

 

Photo d’Amélie Poulain déguisée en Zorro : une décision à cheval sur le critère d’originalité !

Avocat droit d'auteur NantesDans un jugement récent du 19 décembre 2024, le Tribunal judiciaire de Paris s’est prononcé sur la question de savoir si un personnage de film – et notamment le personnage d’Amélie Poulain déguisé en Zorro – était protégé par le droit d’auteur et si son emprunt manifeste pouvant être sanctionné.

 

Contexte : litige sur la protection ou non du personnage d’Amélie Poulain déguisé en Zorro

 

Dans cette affaire, la société ME GROUP FRANCE a diffusé lors d’une campagne publicitaire pour promouvoir ses cabines de photomaton, des images d’une femme masquée à la façon de Zorro dans un photomaton, prénommée « Amélie 2.0 ».

Considérant que cette utilisation représentait une exploitation non-autorisée du personnage d’Amélie Poulain déguisée en Zorro, une scène emblématique du film, et constituait une atteinte à leurs droits, les auteurs, scénaristes et réalisateurs de l’œuvre, ainsi que la société UGC IMAGES, productrice du film et titulaire des droits de distribution, ont engagé une action en justice contre la société ME GROUP FRANCE pour contrefaçon de droits d’auteur (portant sur le droit moral des scénaristes et les droits patrimoniaux de la société de production) ainsi qu’en parasitisme.

 

Solution : absence de protection par le droit d’auteur mais condamnation pour parasitisme

 

Le critère stricte de protection (originalité) par le droit d’auteur jugé non rempli

 

Le Tribunal judiciaire rappelle les critères d’éligibilité de toute œuvre, et notamment d’un personnage de fiction, à la protection par le droit d’auteur : le qualificatif d’œuvre est réservé à son caractère original. Pour déterminer si le personnage est protégeable, le juge doit vérifier que son auteur est parvenu à démontrer que l’empreinte de sa personnalité ressort des caractéristiques physiques du personnage, de ses attitudes comportementales, de ses caractéristiques propres et récurrentes, prises dans leur ensemble.

Dans cette affaire, les demandeurs dénonçaient la contrefaçon à la fois du personnage d’Amélie Poulain déguisé en Zorro et de l’adaptation non autorisée de la scène correspondante. Ils soutenaient leurs prétentions en affirmant que le personnage d’Amélie Poulain et son univers possèdent une originalité propre, notamment par son apparence physique, les traits distinctifs de son visage, son déguisement, ainsi que l’ambiance unique des cabines photographiques.

Après analyse, les juges ont retenu les arguments de la défenderesse, estimant que les critères requis pour bénéficier de la protection du droit d’auteur ne sont pas remplis dans ce cas précis. Selon eux, le personnage d’Amélie Poulain incarne une jeune femme ordinaire sans attributs reconnaissables spécifiques, et les éléments du déguisement, tels que le chapeau et le masque, ne constituent pas des caractéristiques permanentes du personnage.

Le Tribunal en déduit donc que le personnage d’Amélie Poulain déguisé en Zorro est dépourvu de caractère original, de sorte que ce personnage n’est pas éligible à la protection par le droit d’auteur et déboute donc les demandeurs sur le terrain de la contrefaçon.

 

La condamnation sur le terrain du parasitisme

 

Le parasitisme se définit comme le fait de tirer un avantage injustifié des efforts, du savoir-faire, de la réputation ou des investissements d’un tiers en s’appuyant sur son succès.

En l’espèce, les juges ont constaté que la campagne publicitaire reprenait l’image d’une femme brune masquée à la manière de Zorro, posant dans une cabine photomaton. La campagne revendiquait explicitement son inspiration tirée du film en attribuant au personnage le nom « Amélie 2.0 » et en mentionnant directement le film comme référence sur son site internet.

Ils en déduisent que la défenderesse s’est placée délibérément dans le sillage des demandeurs et a tiré indûment profit de la notoriété du film et de son héroïne dans cette scène en particulier. Le Tribunal condamne donc la société à dédommager les demandeurs pour le préjudice moral et le préjudice économique causé.

Vous souhaitez creuser le sujet ? Vous pouvez prendre attache avec un avocat contrefaçon du Cabinet.

 

 

Secret des affaires – pourquoi et pour quel type d’informations ?

Avocat concurrence déloyale Nantes Paris

POURQUOI PROTEGER CERTAINES INFORMATIONS ?

 

Votre entreprise est détentrice d’informations stratégiques et confidentielles, d’un savoir-faire spécifique, d’une formule ou d’une méthode secrète, d’une stratégie commerciale particulièrement efficace, qui vous procurent un avantage concurrentiel et dont la divulgation à des tiers pourrait lui causer préjudice : la protection par le secret des affaires peut s’avérer être une solution adéquate.

En effet, à défaut de protection par exemple au titre de la propriété intellectuelle sur ces informations sensibles, ou dans le cadre d’une stratégie de non-divulgation de votre information (par exemple ne pas vouloir déposer de brevet pour éviter que l’information ne tombe dans le domaine public après la période de protection), vous pouvez opter pour la solution du secret.

Afin d’offrir une protection efficace, le législateur a inséré en 2018 au sein du Code de commerce des dispositions relatives au secret des affaires qui viennent conférer une réelle protection aux informations couvertes par celui-ci.

Il permet de préserver l’avantage concurrentiel de l’entreprise, encourager l’innovation et sanctionner les utilisations et divulgations non autorisées.

 

QU’ENTEND-ON PAR SECRET DES AFFAIRES ET QUE COUVRE-T-IL ?

 

La protection par le secret des affaires bénéficie aux informations remplissant trois conditions cumulatives :

  • elles ne sont pas, en elles-mêmes ou dans la configuration et l’assemblage exacts de ses éléments, généralement connues ou aisément accessibles pour les personnes familières de ce type d’informations en raison de leur secteur d’activité,
  • elles revêtent une valeur commerciale, effective ou potentielle, pour l’entreprise, du fait de leur caractère secret,
  • elles font l’objet par leur détenteur légitime, de mesures de protection raisonnables pour en conserver le caractère secret.

Ainsi le titulaire de l’information (celui qui en a le contrôle de façon licite) doit être en mesure de rapporter la preuve que celle-ci est secrète, c’est-à-dire inconnue du public, qu’il a mis en œuvre les moyens pour la conserver secrète et qu’elle a une valeur commerciale importante pour son entreprise.

 

QU’EST-CE QUI EST PROTEGEABLE PAR LE SECRET DES AFFAIRES ?

 

Sont donc susceptibles d’être protégées par le secret des affaires – à condition de remplir les conditions précitées – les recettes (ex : la recette de Coca-Cola, exemple emblématique du secret des affaires, la recette de la sauce Big Mac de chez Mc Do, les mélanges de certains chocolatiers, etc.), les savoir-faire et procédés industriels, les compositions olfactives des parfums, les stratégies commerciales et financières, les listes de clients ou de fournisseurs, les budgets, les rapports de rentabilités, etc.

 

DES EXCEPTIONS

 

Sont cependant exclues de la protection par le secret des affaires, les informations déjà accessibles du public ou bien connues de l’homme de l’art et celles pour lesquelles la divulgation est requise par les autorités juridictionnelles ou administratives.

Il existe également des exceptions à l’opposabilité du secret des affaires, notamment lorsque son utilisation est intervenue dans le cadre notamment de :

  • la liberté d’expression, la liberté de la presse et la liberté d’information (pour les journalistes),
  • de la révélation d’une activité illégale ou une faute dans un but de protection de l’intérêt général (pour les lanceurs d’alerte),
  • de la protection d’un intérêt légitime reconnu par le droit de l’Union européenne ou le droit national.

 

ET CONCRETEMENT EN PRATIQUE ?

 

Concrètement, la protection du secret des affaires s’inscrit dans une démarche proactive : il est essentiel pour l’entreprise de mettre en place des mesures concrètes de protection pour revendiquer cette protection. Cela peut se matérialiser par exemple par :

  • Signature de NDA avec les différents partenaires et personnes y ayant accès,
  • Insertion de clause de confidentialité dans les contrats de travail,
  • Restreindre l’accès à ces informations à des personnes identifiées et autorisées,
  • Mentionner ces informations explicitement comme « confidentielles »,
  • Sécurisation informatique (codes d’accès, chiffrement, etc.).

Il peut être pertinent le cas échéant en sus de procéder à des dépôts e-Soleau auprès de l’INPI, de procéder à des dépôts auprès d’huissiers ou encore à leur horodatage grâce à la blockchain, afin de leur donner date certaine.

En résumé, il faut, pour bénéficier de la protection, sécuriser vos relations en externe mais également en interne.

 

QUELS SONT LES ACTES SANCTIONNABLES ?

 

Toute atteinte au secret des affaires engage la responsabilité civile de son auteur.

Ainsi, le bénéfice du secret des affaires permet au titulaire d’agir en justice en cas d’obtention de celui-ci sans son consentement, lorsque cela résulte d’un accès non autorisé ou d’une copie non autorisée de cette information ou de tout comportement déloyal ou contraires aux usages.

Le secret des affaires sanctionne également l’utilisation et la divulgation de l’information secrète sans le consentement de son titulaire, lorsqu’elle émane d’une obtention illicite ou de la violation d’un accord ou d’une clause de confidentialité.

Enfin, l’utilisation commerciale (production, offre, mise sur le marché, importation, exportation, stockage) d’un produit issu d’une atteinte au secret des affaires est également sanctionnée.

Le titulaire du secret est également en mesure de demander en justice la prévention ou la cessation d’une atteinte à un secret des affaires. Le juge pourra alors ordonner l’interdiction de la poursuite des actes d’utilisation, de divulgation, d’utilisation commerciale ainsi que la destruction de tout document contenant le secret des affaires. Il peut encore ordonner que les produits issus de manière significative de ces atteintes soient écartés des circuits commerciaux.

 

QUELS SONT LES AUTRES EFFETS D’UNE TELLE PROTECTION ?

 

Si, dans le cadre d’un litige, votre adversaire sollicite une mesure d’instruction visant la communication d’une pièce pour laquelle vous estimez que cela porterait atteinte au secret des affaires, le juge a la capacité de prendre des mesures pour protéger le secret :

  • en prenant connaissance seul de la pièce,
  • en demandant une expertise afin de décider s’il y a lieu d’appliquer des mesures de protection
  • en limitant la production de la pièce à seulement certains éléments, ou en ne communiquant qu’un résumé ou en restreignant l’accès,
  • en décidant que l’instance se tiendra en chambre du conseil,
  • en adaptant la motivation de sa décision et les modalités de publicité de celle-ci aux nécessités de la protection.

Toutes les personnes qui ont accès à une pièce considérée par le juge comme étant couverte ou étant susceptible d’être couverte par le secret des affaires sont soumis à une obligation de confidentialité.

 

Vous souhaitez en savoir plus, un avocat concurrence déloyale du Cabinet SOLVOXIA AVOCATS se tient à votre disposition.

 

 

Le retrait de contenus sur Internet ne passe pas comme une lettre à la poste

Avocat e-réputationDans un jugement du 18 septembre 2024 (n°22/10502), le Tribunal judiciaire de Paris a examiné une demande de retrait de contenus sur Internet mentionnant la condamnation pénale d’une personne.

 

Contexte :

 

Le demandeur avait été déclaré coupable, en 2012, de plusieurs infractions pénales liées à ses pratiques professionnelles dans le domaine de vente et d’achat de collections de timbre.

En appel, seul un chef de condamnation avait finalement été retenu contre lui (entre autres).

La même année, il avait identifié un article posté sur un blog intitulé « Le crime ne paye pas, même en Philatélie », citant expressément son nom et faisant état de sa condamnation.

Il avait demandé à différentes entités de GOOGLE ainsi qu’à la CNIL de retirer l’accès à la page Internet concernée et de déréférencer son adresse URL, sans succès ; il a en conséquence engagé une action en justice.

 

Solution :

 

1/ Les demandes de déréférencement

 

Dans le cadre d’une action en déréférencement, le Tribunal rappelle que seules les demandes formées à l’encontre de la personne responsable du traitement au sens du RGPD sont susceptibles d’être recevables.

En l’occurrence, l’activité d’un moteur de recherche devant être qualifiée de traitement de données personnelles, l’exploitant du moteur de recherche Google (à savoir GOOGLE LLC) était la seule partie à l’encontre de laquelle l’action aurait dû être formée (les demandes formées contre notamment GOOGLE FRANCE ont été jugée irrecevables). Dans cette affaire, GOOGLE LLC était tout de même intervenue volontairement.

S’agissant ensuite de la demande de déréférencement à proprement parler, le Tribunal rappelle qu’une personne physique peut demander à un moteur de recherche de supprimer de la liste des résultats affichés après une recherche sur ses prénoms et noms, des liens vers des pages web contenant des données personnelles lui appartenant mais étant inexactes, incomplètes, équivoques, périmées ou pour lesquelles des motifs légitimes s’opposent au traitement.

Ce droit à la vie privée et à la protection des données doit toutefois se concilier avec les droits à la liberté d’expression et d’information, dans la recherche d’un juste équilibre prenant en compte l’intérêt légitime des internautes potentiellement intéressés à avoir accès à une information.

En l’espèce, le demandeur ne justifiait toutefois pas pour deux URL quelles données y auraient été accessibles et, pour l’URL restante, qu’elle figurait dans les résultats d’une recherche basée sur ses seuls nom et prénom, les extraits qu’il fournissait les montrant depuis des recherches effectuées à partir de mots clés supplémentaires (notamment son nom et prénom plus les termes « escroc » ou « timbre »).

Estimant que les règles propres au déréférencement doivent être appliquées de façon stricte, le Tribunal a donc rejeté les demandes à ce titre.

 

2/ Les demandes tendant à rendre inaccessible la page Internet

 

Le Tribunal relève dans un premier temps que le traitement des données contenues sur la page par Google, qui était également l’hébergeur du site, constitue une ingérence importante dans le droit fondamental du demandeur à voir protéger ses données ainsi que sa vie privée, compte tenu du caractère particulièrement sensible des informations pénales contenues dans ces données.

Il s’attache en conséquence à examiner si l’accès à cette page est strictement nécessaire à l’information du public, en tenant compte notamment de la nature et la gravité de l’infraction, du déroulement de la procédure mentionnée et du temps écoulé depuis.

Il relève ainsi que :

  • Les faits mentionnés dans l’article correspondent à ce qui est évoqué dans la décision du Tribunal correctionnel, tout comme les condamnations,
  • L’auteur de l’article avait alerté ses lecteurs sur le fait que la décision n’était pas définitive et qu’il convenait d’attendre l’issue du recours formé,
  • La page Internet est strictement nécessaire à l’information légitime d’un internaute intéressé par la philatélie et susceptible de recourir aux services du demandeur pour l’achat ou la vente de timbres,
  • La page ne concerne pas uniquement le demandeur, mais également d’autres personnes, dont sa société.

Le Tribunal déduit de l’ensemble de ces éléments qu’une mesure qui conduirait à rendre cette page totalement inaccessible constituerait une atteinte disproportionnée à la liberté d’expression de l’auteur de l’article et au droit à l’information du public.

Les demandes tendant à rendre inaccessible la page Internet sont donc également rejetées.

En résumé, il ne suffit pas qu’un contenu sur Internet contienne des données personnelles, même ayant trait à des condamnations pénales, pour que l’on puisse le rendre inaccessible : doit en effet être recherché un équilibre entre les droits de la personne concernée et le droit à l’information du public.

 

Vous voulez plus d’informations sur ces sujets ? Des avocats e-réputation du cabinet sont à votre disposition.