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Avocat Nantes La Roche sur Yon Paris

Quand le masque prend l’eau

Avocat concurrence déloyale Nantes ParisDans un arrêt du 26 juin 2024 (pourvoi n° 22-17.647), la chambre commerciale de la Cour de cassation s’est prononcée sur la titularité d’un dessin et modèle portant sur un masque intégral de plongée et sur des faits de parasitisme invoqués contre une concurrente.

 

Contexte : la commercialisation d’un masque de plongé considérée contrefaisante et parasitaire

 

La société Decathlon commercialise, sous la marque Tribord notamment, un masque intégral au tuba intégré ayant pour but d’éviter l’accumulation de buée et une possible gêne respiratoire. Ce produit avait fait l’objet d’un dépôt de modèle communautaire.

Trois ans plus tard, la société Intersport commercialisait à son tour un masque intégral au tuba intégré.

La société Decathlon a donc assigné sa concurrente (notamment) pour contrefaçon et parasitisme. La Cour d’appel a rejeté l’action en contrefaçon, car considérant que les similitudes entre les masques étaient principalement dues à la reprise de caractéristiques techniques. Néanmoins, elle a fait droit aux demandes fondées sur le parasitisme économique.

Les défenderesses se sont pourvues en cassation.

 

Contexte : un  modèle valide non contrefait mais des actes de parasitisme retenus

 

La présomption légale de titularité d’un dessin ou modèle ne peut être renversée que par une revendication de propriété par son créateur

 

Pour rappel, le délai de grâce prévu à l’article 7.2 du règlement (CE) n° 6/2002 sur les dessins ou modèles communautaires prévoit qu’alors qu’un dessin et modèle doit, pour être valide, ne jamais avoir été divulgué auparavant, une tolérance d’un an est accordée au créateur du produit ou son ayant-droit pour procéder au dépôt.

Les sociétés demanderesses s’appuyaient sur ce texte pour soutenir que le dépôt ayant été réalisé après une divulgation du produit, dont la société Decathlon ne serait pas le créateur, elle ne pouvait invoquer le délai de grâce. En résumé, le dessin et modèle devrait être annulé pour défaut de nouveauté.

La Cour de cassation a entériné l’arrêt d’appel et reconnu le bénéfice de ce délai de grâce aux sociétés défenderesses, en recourant à la présomption légale de titularité de l’article 17 du même règlement.

Elle a en effet affirmé sans ambiguïté que : « La présomption résultant de ce texte [l’article 17] en faveur du déposant ne peut être renversée qu’en présence d’une revendication de propriété du dessin ou modèle émanant de la ou des personnes physiques l’ayant réalisé » (point 11 de l’arrêt).

En bref, seul le créateur d’un dessin ou modèle peut faire échec au bénéfice de ce texte.

L’arrêt d’appel a donc été confirmé sur ce point et la demande en nullité, tirée du défaut de titularité, écartée.

 

La valeur économique du masque reconnue et le parasitisme considéré comme caractérisé

 

Outre la validité du modèle qui leur était opposé, les demanderesses au pourvoi contestaient leur condamnation du chef du parasitisme.

Elles affirmaient ainsi que la déclinaison d’un concept développé par un concurrent ne saurait constituer une faute constitutive de parasitisme et qu’aucun fait distinct de ceux fondant la demande en contrefaçon n’était caractérisé. Enfin, elles avançaient l’idée que la liberté du commerce et de l’industrie s’oppose à ce qu’un opérateur économique puisse s’arroger un monopole sur des produits qui sont définis par des caractéristiques fonctionnelles.

La Cour de cassation a rejeté leur demande et confirmé, sur ce point encore, l’arrêt d’appel.

Elle a d’abord rappelé la définition -connue désormais- du parasitisme économique, qui s’entend d’une « une forme de déloyauté, constitutive d’une faute au sens de l’article 1240 du code civil, qui consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d’un autre afin de tirer indûment profit de ses efforts, de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis » (point 17 de l’arrêt).

Ensuite, la Cour a rappelé c’est à celui qui estime être victime d’actes de parasitisme de démontrer deux choses : « la valeur économique individualisée qu’il invoque » et « la volonté d’un tiers de se placer dans son sillage » (point 18 de l’arrêt).

Dans cette affaire, la Cour de cassation est venue apporter des précisions sur la notion, parfois nébuleuse, de « valeur économique identifiée et individualisée ». Elle reprend ainsi une liste des éléments, évoqués par la cour d’appel, pour caractériser la notion. Elle vise ainsi : la « grande notoriété » des masques en cause, « la réalité du travail de conception et de développement sur une durée de trois années pour un montant de 350 000 euros », « le caractère innovant de la démarche », « les investissements publicitaires » effectués d’un montant de « plus de trois millions d’euros » et « un chiffre d’affaires de plus de 73 millions d’euros […] généré par la vente de ces produits ». Tout ces éléments, pris dans leur ensemble, permettaient de démontrer que les masques de plongée en cause constituaient une « valeur économique identifiée et individualisée » (point 20 de l’arrêt).

Enfin, au stade de la caractérisation de l’élément intentionnel du parasitisme, la Cour de cassation confirme une nouvelle fois la décision des juges du fond en affirmant que les demanderesses « ne justifient d’aucun travail de mise au point ni de coût exposés relatifs à leur propre produit » (point 20 de l’arrêt) et que, d’autre part, elles ont commercialisé leurs propres masques « à une période au cours de laquelle les sociétés [défenderesses] investissaient encore pour la diffusion de spots publicitaires » et qu’à cette date, le masque parasité « rencontrait encore un grand succès commercial » point 22 de l’arrêt). La conjonction de ces éléments permet d’établir que les demanderesses ont ainsi pu « bénéficier, sans aucune contrepartie ni prise de risque, d’un avantage concurrentiel et caractérise la volonté délibérée de ces dernières de se placer dans le sillage des sociétés [défenderesses] pour bénéficier du succès rencontré auprès de la clientèle par leur masque subaquatique » (point 23 de l’arrêt).

Forte de ces constatations, la Cour de cassation a estimé que c’était à bon droit que la cour d’appel avait condamné les demanderesses du chef de parasitisme.

Vous souhaitez en savoir plus, un avocat concurrence déloyale du Cabinet SOLVOXIA AVOCATS se tient à votre disposition.

 

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