Par un arrêt du 22 mars 2023 (n° 21-24.217), la Cour de cassation a eu à se prononcer sur la question de savoir si la reprise alléguée d’un scénario de série policière était constitutive d’un acte de parasitisme.
Contexte : La mini-série policière « En immersion » diffusée par la chaîne Arte
Deux co-auteurs d’un scénario d’une série policière télévisée intitulée « Immersion » ont consenti un contrat de cession à titre exclusif pour une année à la société Mascaret film (filiale de Studio canal séries).
Par un avenant, en l’absence d’un diffuseur, les parties ont par la suite résilié le contrat.
Les co-auteurs ont cependant appris en 2016 la programmation d’une mini-série « En immersion » sur la chaîne Arte qui reprenait le thème principal du scénario, soit l’infiltration d’un agent de police dans le milieu criminel.
Ils assignent en conséquence la société Mascaret sur le fondement d’une contrefaçon de droits d’auteur et de parasitisme.
En première instance et en appel, les co-auteurs sont déboutés de leurs demandes.
La Cour de cassation est alors saisie.
Solution : le parasitisme pour reprise de scénario écarté
Le parasitisme se fonde sur l’article 1240 du code civil relatif à la responsabilité délictuelle et consiste dans « le fait de se placer dans le sillage de la victime en profitant indûment de ses efforts, de son savoir-faire, de sa notoriété ou de ses investissements ».
Les juges du fond avaient donc été amenés à apprécier l’existence de similitudes entre les deux projets susceptibles de caractériser une reprise fautive de leur travail ou autre comportement déloyal.
Dans ce cadre, l’analyse avait porté sur « le format des deux séries, les intrigues et leur contexte, les thèmes abordés, ainsi que les personnages et leur psychologie ».
Or « à l’exception du titre et d’une thématique très générale d’infiltration policière » présentant une ressemblance, la Cour d’appel avait jugé que la série «En immersion» ne reprenait pas les caractéristiques du scénario de la série « Immersion » :
- Le format était tout d’abord différent : 8 épisodes pour la saison 1 et la prévision de 3 saisons au moins contre 3 épisodes pour la série litigieuse,
- Le projet de la série «Immersion » s’articulait autour de deux axes ; les missions des agents du SIAT et le monde extérieur (la vie du SIAT – service de la police judicaire chargé de la préparation et de la réalisation des opérations d’infiltrations), la vie des proches, les interventions des soutiens et des opposants au SIAT). La saison 1 devait suivre en parallèle trois agents infiltrés dans trois univers différents du crime organisé à des moments différents de leurs enquêtes.
- La série «En immersion» n’est, quant à elle, pas centrée sur le SIAT, qui n’est d’ailleurs pas nommé, mais sur un personnage de policier atteint d’une maladie neurologique létale, qui voit sa fille sombrer dans la drogue entraînée par son petit ami et qui va décider d’infiltrer le réseau dirigé par Ak Al, dangereux dealer, mettant en circulation une nouvelle drogue. A l’inverse, les personnages du projet des demandeurs étaient, quant à eux nombreux, sans que l’un d’eux prédomine.
- Enfin, selon la Cour d’appel, le traitement du thème de l’infiltration policière est en tout point différent de celui du scénario des demandeurs, en ce que le cadre de l’infiltration policière est largement dépassé pour y inclure une réflexion d’ordre plus général et onirique sur le naufrage personnel de plusieurs personnages tous liés à un trafic de drogues, ainsi que les conséquences de l’annonce d’une maladie dégénérative incurable sur la vie d’un policier sans envergure, figure de l’anti-héros, qui va se transcender pour sauver sa fille.
Saisie du sujet, la Cour de cassation considère que la Cour d’appel avait légalement justifié sa décision.
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