Skip to content
Avocat Nantes La Roche sur Yon Paris

Liberté d’expression artistique et dignité de la personne humaine : mais où est la limite ?

Dans un arrêt de principe, en date du 17 novembre 2023 (n°21-20.723), l’Assemblée Plénière de la Cour de cassation a rejeté une demande en restriction de la liberté d’expression, et la liberté d’expression artistique, fondée sur un non-respect à la dignité de la personne humaine.

 

Contexte : les écrits d’un artiste considérés comme contraires à la dignité de la personne humaine

 

Le Fonds régional d’art contemporain de Lorrain (le FRAC) avait invité un artiste à exposer la part d’ombre de la cellule familiale.

Il avait ainsi présenté une suite de lettres manuscrites contenant des propos tels que « les enfants, nous allons vous enfermer, vous êtes notre chair et notre sang, à plus tard Papa et Maman », « Les enfants, nous allons faire de vous nos putes » ou « Les enfants, nous allons vous défoncer le crâne à coups de marteau. » 

L’Association générale contre le racisme et pour le respect de l’identité française et chrétienne (l’AGRIF) s’était saisie de l’affaire pour contester la publicité de l’exposition.

L’association invoquait à l’appui de sa demande l’article 16 du Code civil relatif au respect de la dignité de la personne humaine.

Les juges de première instance avaient fait droit à la demande de l’association, ce qui avait été infirmé par la Cour d’appel.

L’affaire a alors été portée devant la Cour de cassation.

 

Solution : le respect à la dignité de la personne humaine ne peut être un motif de restriction de la liberté d’expression et la liberté d’expression artistique

 

La question dont l’Assemblée Plénière de la Cour de cassation était saisie était la suivante : peut-on considérer que la sauvegarde de la dignité humaine, énoncée à l’article 16 du code civil, peut justifier, une limitation à la liberté d’expression, notamment à la liberté de création artistique ?

Les hauts magistrats ont rappelé tout d’abord que pour qu’une limitation à la liberté d’expression soit envisageable, deux conditions doivent être remplies : elle doit être prévue par la loi, et cette restriction doit être justifiée par l’un des objectifs énumérés à l’article 10, paragraphe 2, de la Convention européenne des droits de l’homme.

La Cour rappelle ensuite sa position passée selon laquelle la dignité de la personne humaine ne peut être érigée en fondement autonome des restrictions à la liberté d’expression (Ass. plén., 25 octobre 2019, pourvoi n° 17-86.605, publié). Elle précise en outre que l’article 16 du code civil, créé par la loi n° 94-653 du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain et invoqué par la requérante, ne constitue pas à lui seul une loi, au sens de l’article 10, paragraphe 2, de la Convention, permettant de restreindre la liberté d’expression.

L’association poursuivant l’exposition des œuvres en cause sur le seul fondement de l’atteinte à la dignité au sens de l’article 16 du code civil, la Cour de cassation considère que la cour d’appel a exactement retenu que le principe du respect de la dignité humaine ne constitue pas à lui seul un fondement autonome de restriction à la liberté d’expression

 

 

 

A lire aussi...